C’est la maison du bois, aux ouvertures… murées !
Et dedans… C’est ballot ! Un pauvre homme… emmuré ?
Il est pondu du jour, écrit nu, sans tunique,
Le poème que voici ; il était seul au monde.
Est-ce une qualité d’être un enfant unique ?
Si la fratrie est grande, en quoi serait-ce immonde ?
Tiens donc ! Il est trop tard. Je sens venir les autres…
Beaucoup de maux à dire sur ce vilain apôtre
Et je les sens pressés de cracher leur venin,
Affreux petits serpents et leurs destins de nains
Ulcèrent leur orgueil d’alexandrins râleurs…
Le voici, l’acrostiche, arrivé bien à l’heure :
’
Il s’agit de gagner des sous en spéculant,
Mais, pendant ce temps-là, des gueux, gesticulant,
Meurent de faim en tâchant d’habiter quelque part…
On peut y voir la patte des Gros qui accaparent :
Bien vautrés dans la soie, leur tas d’or à la banque,
Ils se moquent de savoir ce dont les autres manquent !
Les autres ? C’est la France, des gens sans importance…
Il est usé le temps du gros fromage à trous
Et les rats faméliques, lassés des tours d’écrou,
Redeviendront des lions, en votant Mélenchon ?
Il a un, deux appart’s, qu’il loue pour de l’argent,
Mais ce Monopoly n’est pas si innocent…
Maudit soit ce pognon qui fait pleurer les gens !
On fait monter les prix et puis bouillir nos sangs,
Bloqués dans nos artères, sinon ils gicleraient…
Il est deux fois moins cher en pays d’Outre-Rhin.
Les Allemands s’en tirent, quand, nous, on en pleurait…
Il est légal de faire du profit sur les reins
Et pourquoi pas les corps entiers et puis les toits ?
Retourne à ton miroir, et là… regarde-toi !
Il y a un beau trois-pièces qui prend de la valeur…
Mais ce n’est pas depuis un an, une saison…
Mais non, depuis quinze ans, au sein de la maison,
On a trois belles pièces vides, sans crainte pour les voleurs !
Beaux voilages aux fenêtres, éloignant les squatteurs,
Il s’agit d’un tas d’or, avis aux amateurs…
L’investissement est bon : il a triplé son prix.
Il n’est pas même à louer : les locataires ? Mépris !
Et les voisins sont braves, confits de gentillesse :
Regardez-les, tassés, à cinq dans leurs deux-pièces !
Ils font des heures en train pour aller travailler
Mais c’est le prix qu’ils paient pour pouvoir habiter
Maison et jardinet, et ils ont beau bâiller
On ne les plaindra pas, c’est une énormité !
Bonheur de la campagne, où l’air pur Monsanto
Irrigue de pesticides les bronches, les végétaux !
Les voilà qui se plaignent, mais ils ont bien choisi…
Ils l’ont voulu, leur toit, symbole de bourgeoisie ?
En venant réclamer, ils en ont du culot !
Reposant, leurs week-ends, au milieu des mulots…
Il est fou l’affreux loup qui fixe les tarifs,
Mais ce n’est pas un homme qui chasse loin du périph’
Mes frères et sœurs honnêtes qui ne demandent qu’à vivre…
On a un bon système, conçu pour rapporter :
Beaucoup de gens s’engraissent ou plutôt ils s’enivrent…
Il en faut des notaires, des agences confortées,
Les experts en tous genres, qui mesurent tout ce qu’ils peuvent…
Il arrive, par ailleurs, que dans vos chambres il pleuve,
Et le bonheur humain n’est jamais assuré
Rien que tant que l’Argent règne au ciel azuré…
Il est encore monté, le prix du mètre carré !
Mes mains chéries, je frotte, et mon sourire ravi
Montre bien que l’argent s’accumule dans ma vie…
On me dira parfois pour me contrecarrer
Beaucoup de bien des gens que les prix vont chasser…
Ils n’ont qu’à faire comme moi (comme si c’était possible),
Les joyeux locataires, qui en auraient assez !
Ils ne m’intéressent pas, car j’ai bien d’autres cibles,
Et des bien plus juteuses, mais c’est une autre histoire,
Racontons-la plus tard, près d’un autre comptoir…
Il faut un canapé pour dormir dans la nuit,
Mais c’est qu’il manque une chambre dans notre "pied-à-terre"…
Mes bonnes vertèbres, hélas, le couchage leur a nui
Obligeant à jeter des matelas par terre…
Bel objet, ce sofa, couvert par deux TRÉCA !
Il importe assez peu que les maisons des gueux
Laides à l’extérieur, cuisine en formica,
Irradiant l’inconfort, soient carrément dégueus…
En méprisant les autres, les "un pour cent" vont mieux,
Regardant leurs enfants, la fierté dans les yeux !
Il ne peut plus payer ? Mais foutez-le dehors !
Mon avocat m’a dit que, dans les mois d’été,
Mettre à la rue l’infâme qui s’est trop endetté
Oblige à quelques ruses… mais préservez mon or !
Boutez donc l’importun hors des murs de mon bien !
Il en a du culot d’oser tant s’accrocher,
Lui et ses trois marmots, comme moules sur un rocher…
Il faut quérir les flics, l’huissier… Dieu sait combien
Est-ce que va me coûter la vilaine expulsion ?
Retenez-moi, ma mie, de mort, j’ai des pulsions !
Il est trop cher pour vous ? Ce n’est pas un problème !
Mon agence a l’affaire qui est faite pour vous plaire.
Monsieur Durand va vous… Ne soyez pas colère !
On a juste ce qu’il faut, même si c’est un peu blême…
Bien sûr, ce sera loin… Vous avez une voiture ?
Il y a même un garage, et… grand comme un caveau !
La maison n’est pas neuve, on voit bien… la toiture…
Il faudra bien prévoir quelques petits travaux
Et vous serez chez vous, loin des bruits de la ville,
Rangé comme un cafard, sur la route de Deauville…
Ils ont fait une cabane dans le bois de Vincennes,
Modeste petit bois, à Paris, près de la Seine…
Mais ce sont des gamins d’un genre un peu spécial,
Ou bien des attardés, car ils ont passé l’âge…
Bah ! Quel mal ça fait-il ? Si un être asocial
Investit ce beau bois avec son bricolage,
Le mal serait bénin, mais c’est pour habiter !
Il y reste à demeure, dans sa cage à lapin,
Et les tentes discrètes qu’on voit près des tapins,
Ravissant voisinage… Belle illégalité !
Il fait froid, dans les pièces de cette vieille demeure.
Mes quatre radiateurs ont fait sauter les plombs.
Mettez plutôt trois pulls, un polaire en doublon !
On trouve qu’il y fait froid et, peu à peu, on meurt…
Bouchez les ouvertures et l’humidité reste :
Il se forme des flaques sur le sol et ça sent
Le moisi qui s’étend sur les murs du nord-est.
Il est cher, le chauffage, et les prix vont croissant.
Encore hier le bail a été augmenté…
Regardez-nous, pendus, dans ce manoir hanté !
Il se lève avant l’aube pour prendre sa voiture.
Maintenant, il arrive au parking de la gare.
Monté dans le wagon, il pense à sa toiture.
On devra la refaire, réfléchit-il, hagard…
Bientôt, ses yeux se ferment tant il est fatigué.
Il n’est pas arrivé encore à Saint Lazare.
Le métro vient ensuite, coups de coude prodigués…
Il finit par pointer : on ne laisse au hasard
En fait que ce qui est trop dur à maîtriser…
Rebelote pour le soir… Belle vie à mépriser !
Il dort sur le trottoir à longueur de journée.
Mille passants le côtoient, voyant un animal,
Mais, on sait, l’apparence… n’y voyez pas du mal…
On dirait un humain, qui aurait mal tourné.
Bovidé paresseux au ras de la chaussée,
Il doit être gentil ou la maréchaussée
L’aurait déjà jeté loin du luxueux trottoir…
Il n’y a donc nul danger, nul problème, c’est notoire.
Excusez-moi, monsieur, vous auriez un euro ?
Réveillez-moi ! Il parle… Comme nos bons libéraux !
Il est l’unique fauteur de tout ce qui nous trouble.
Mille méfaits, il commet, à chaque seconde qu’on double…
Mettez-le en prison ! Il n’est même pas vivant.
On lui donne mille noms, couché sur le divan,
Bavardant de ses crimes, sans vouloir les freiner…
Il fait monter les prix, dans un jeu effréné.
Les maisons ne sont qu’un de ces terrains de jeux :
Il est beau celui-ci, humainement piégeux,
Et il fait trop souffrir bien des milliards de gens.
Regardez ce démon, dont le nom est l’Argent !
Il faudrait que chacun ait un toit pour dormir,
Modeste, confortable et facile à chauffer…
Mais où prendre l’argent ? À tous ceux qu’on admire…
On nous les montre bien, sachant philosopher,
Baladant leur bling-bling devant les caméras.
Ils auraient moins en haut, on chasserait les rats…
Les restaurants du cœur n’auraient plus raison d’être.
Il suffit d’y penser : si l’on cesse d’entasser,
En bas, on va enfin apprécier le mieux-être,
Retrouver l’air humain, penser à s’enlacer…